La sagesse africaine comme certaines autres à travers l’humanité, reconnaît deux formes de mort : la mort physique inéluctable qui concerne tout vivant (animal, végétal et humain) et la mort sociale qui est celle que tout individu humain digne se doit d’éviter, toute sa vie physique durant.
Car celle-ci est évitable dès lors qu’elle consacre le tribut d’une vie mauvaise, celle de l’individu humain qui aurait vécu inutilement pour les autres et s’en serait allé sans rien laisser de glorieux, de vertueux à sa postérité, à son pays, à l’humanité. La « bonne » mort à l’opposé, qui triomphe de la mort physique (biologique), est ce sort fort enviable réservé à quelques élus qui survivront éternellement à travers les oeuvres qu’ils laissent, les souvenirs que les survivants garderont d’eux, et la croissance des valeurs et espoirs qu’ils auront semés aussi longtemps que leur physique le leur permettra.
Joseph Ki-Zerbo est physiquement mort depuis le 4 décembre 2006, mais il est socialement plus vivant que jamais. Il a été gratifié d’une « bonne » mort pour avoir pleinement rempli son « contrat de vie » pour lui-même, pour sa famille et surtout pour la patrie africaine et burkinabè, qui savent et sauront le lui reconnaître.
Comme on le dit avec profondeur et vénération, on ne pleure pas la mort des grands hommes : on s’empare plutôt du flambeau qu’ils ont allumé et on s’engage solennellement à le protéger, à le perpétuer pour le triomphe de la lutte qu’ils ont engagée de leur vivant.
Joseph Ki-Zerbo est sans conteste, de ces grands hommes qu’on ne pleure pas. Le vide que sa mort physique a laissé, loin d’être l’expression d’un néant existentiel, est au contraire, l’ensemble des sillons qu’il a tracés et qu’il nous invite à continuer pour y faire croître les valeurs qu’il y a enfouies, avec le courage, l’abnégation, l’amour de l’autre et de la patrie qu’on lui reconnaît unanimement.